En direct de Tokyo ...

par Karyn Nishimura-Poupée, correspondante AFP Japon, avec le mangaka japonais J.P.NISHI

Japon: la majorité des entreprises vont bien...

... mais Sanyo, JVC et les femmes patronnes ont besoin de soutien

Publié par K. Poupée le Mercredi 21 Mars 2007, 00:40 dans la rubrique économie - Lu 7101 fois - Version imprimable




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Depuis le début de l'exercice budgétaire 2006/2007 (avril 2006 a mars 2007) nous suivons sur ce blog l'évolution des résultats financiers des entreprises, un indicateur de la santé économique du pays.
Les deux premiers trimestres nous ont enseigné que, pour la plupart des industriels, l'expansion de la croissance était une réalité qui se lisait dans leurs comptes, à défaut de se traduire sur les feuilles de paye.
Il en a été de même à l'issue du troisième trimestre, fin décembre, comme l'a montré la dernière vague de résultats publiée en février et mars pour les neuf premiers de l'année budgétaire (notez, soit dit en passant, qu'on n'écrit pas ici "année fiscale" contrairement à de nombreux media, car il s’agit d’un vilain anglicisme qui ne recouvre pas la réalité).



Revenons à nos moutons.

Les poids lourds de la Bourse de Tokyo ont donc affiché de belles performances entre avril et décembre 2006, grâce à des ventes tirées par des produits de bonne facture ayant le vent en poupe (voitures, téléviseurs à écran plat, appareils photo numériques Reflex, imprimantes/copieurs multi-fonctions, composants électroniques, instruments de précision, machines outils, engins de chantiers et mines...).
Les revenus des sociétés japonaises exportatrices ont en outre souvent été aidés par la faiblesse du yen face aux autres devises, un facteur qui renforce la compétitivité des marchandises nippones à l'étranger.



Toyota, Canon ou Sharp n'en finissent pas d'aligner les records de recettes et profits. Matsushita (marques Panasonic et National) a réalisé en neuf mois les objectifs qu'il se fixait pour l'année.



Sony a bel et bien amorcé sa phase de redressement grâce à ses TV à écran plat à cristaux liquides (LCD), même si le résultat final a été un peu rongé par la console de jeux PlayStation 3 (PS3) dont le coût de production dépasse le prix de vente. Nikon ou Ricoh vendent des copieurs à tour de bras. Komatsu profite du boom de la construction en Chine ou aux Etats-Unis et des besoins massifs d’engins dans les mines ...



En revanche, les groupes, moins nombreux, qui n'ont pas pu ou pas su innover, qui ont tardé à se restructurer, ou qui ont fait face à des accidents de parcours, s'en sortent évidemment beaucoup moins bien. C'est le cas de JVC (dans le rouge), d'Hitachi (qui a connu des pépins avec ses turbines pour centrales électriques) ou de Sanyo, un cas sur lequel nous allons nous attarder un peu.



Financièrement Sanyo va très très très mal.
En crise depuis plus de deux ans, le groupe, dont le siège se trouve à Osaka (centre industriel de l'ouest), a du supprimer 14.000 postes dans le monde, vendre des immeubles, céder des activités non rentables et trouver des investisseurs pour remettre de l'argent au pot.. Peine perdue.
Cette thérapie de choc, administrée par la patronne nommée mi-2005, l'ex-journaliste Tomoyo Nonaka, femme d'influence au sourire permanent, n'a pas suffi. De surcroît, voilà que le gendarme de la Bourse nippone soupçonne des erreurs dans la comptabilité de Sanyo pour les exercices antérieurs. Bref, c'est pire.



Alors que dire? Que Sanyo a vécu? Que la boîte manque d'idées, de créativité, d'ingéniosité et de technologies clefs? Non, car ce serait faux. Au contraire. Sanyo possède des milliers de brevets et peut sans rougir se targuer d’avoir à son actif plusieurs savoir-faire hors pair qui vont dans le sens du vent.



Las. Par les temps qui courent, avoir à coeur de développer des produits aux vertus écologiques (panneaux solaires bi-faces à haut rendement, cellules photovoltaïques uniques, batteries à combustibles, piles rechargeables Eneloop, systèmes de réfrigération industriels sans freon, purificateurs d'air anti-virus...) ne rassasie pas l’appétit des voraces actionnaires (Goldman Sachs par exemple) davantage assoiffés d'argent immédiatement que soucieux de la préservation de l'environnement ultérieurement. ça laisse un goût amer.



La même impression nous saisit dans le cas de JVC (Japan Victor Company), inventeur de la cassette au format VHS, as de l'acoustique dont le slogan, "La voix de son maître", résonne encore aux oreilles des audiophiles.



JVC est en effet en passe d'être cédé par son actionnaire majoritaire en pleine forme, Matsushita, à un fonds d'investissement américain, uniquement pour des raisons pécuniaires, histoire de ne pas grever les comptes et bénéfices de la maison-mère.



On ne peut que déplorer ces situations et souhaiter à Sanyo comme à JVC de vite se redresser, car leurs ingénieurs passionnés et autres salariés le méritent.
Un trou d'air financier n'obère l'avenir d’une entreprise que si les fondamentaux (savoir-faire technique, capacité d’innovation, brevets...) ont disparu, ce qui n'est ni le cas de Sanyo, ni celui de JVC.
Mais les champions des "mécano boursiers" ont une vision “court-termiste” et un pouvoir décisionnaire hélas bien supérieur à celui des ingénieurs.

Le cas de Sanyo fait d'autant plus mal au coeur que la “pédégère” Nonaka, une des rares femmes à la tête d'une entreprise nippone, a du jeter l'éponge le 19 mars, acculée à la démission par un conseil d'administration majoritairement masculin, refusant sa demande de diligenter une enquête indépendante pour vérifier les procédures comptables et la source des erreurs auxquelles s'intéressent les autorités.
Auraient-ils quelque chose à se reprocher, messieurs les administrateurs de Sanyo??




Pour couronner l'affaire, simultanément, une autre patronne de grand groupe, Fumiko Hayashi, une femme d'affaires humble et pragmatique, qui a contribué à sauver les supermarchés Daiei de la faillite, a été brutalement rétrogradée le 20 mars 2007 au poste de vice-présidente (un placard). Cette décision s’inscrit dans la logique du "business" après le rachat d'une partie de Daiei par son concurrent, le géant de la distribution nippon Aeon. Il n'empêche, cet évincement qui ne dit pas son nom n’en est pas moins regrettable.


Voilà en tout cas deux faits concomitants qui ne vont pas aider le Japon à se departir de son image déplorable et souvent exagérée, quoi que non dénuée de tout fondement, de pays machiste. On y reviendra, ici ou ailleurs et d'ici peu.



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Commentaires

Re: Je pense...

Entièrement d'accord avec vous...

Ca fait tout de même mal au coeur de voir des fleurons de l'industrie japonaise à deux doigts de la revente pour cause de non rentabilité immédiate !

Et si seulement ce n'étais qu'au Japon...

ShoLine - 22.03.07 à 21:19 - # - Répondre -

Et Sony ?

Bonjour Karyn,

Vous n'avez pas parlé de Sony dans votre article. Même si la célèbre firme japonaise est sans doute loin de la faillite, elle est malgré tout très loin d'avoir une santé exemplaire !

On peut imputer ces difficultés à des choix stratégiques pour le moins critiquables, mais c'est un fait aujourd'hui Sony s'est fait souffler la première place dans de nombreux domaines de l'électronique grand public !
Et je ne parle pas des scandales survenus récemment, comme les batteries de portables déffectueuses...

ShoLine - 22.03.07 à 21:23 - # - Répondre -

Lien croisé

jvc en faillite? : "une connaissance veut acheter une caméra (pour filmer) à disque dure et a appeler a un dumoulin, le vendeur lui aurait dit que JVC était en faillite......j'ai chercher sur internet mais rien trouver a part ca ----> http://en.wikipedia.org/wiki/JVC ----> http://tokyo.viabloga.com/news/japon-la-majorite-des-entreprises-vont-bienalors je me demandais pourquoi le gars du dumoulin aurais dit ca a mon amis???tk, si vous avez des infos??"

anonyme - 22.06.07 à 11:09 - # - Répondre -

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